Les troubles dépressifs sont courants, souvent récidivants, et le plus fréquemment traités en 1ère ligne par les prestataires capables d’écoute et de compréhension empathique que sont les généralistes. Mais, estime le conseil supérieur de la santé (CSS), ces derniers se sentent parfois mal à l’aise ou démunis devant la gestion des troubles de l’humeur, plus chronophage qu’une consultation lambda, d’autant qu’ils ne trouvent pas forcément le soutien espéré quand cela se corse : psychiatres, psychothérapeutes, voire services d’urgence ne sont pas toujours suffisamment disponibles pour les épauler.
L’affaire de toute une société
Les médias ne manquent jamais de souligner, dès que sort une étude à ce propos, la consommation d’antidépresseurs. La prise en charge de la dépression se limite souvent, pour diverses raisons, au traitement médicamenteux, admet le CSS, « alors que c’est un modèle d’intervention bio-psycho-social qui devrait être privilégié ». Le conseil a donc pris l’initiative de proposer aux MG des recommandations pour les aider dans la prise en charge globale de la dépression. Va-t-il se mettre à les clouer à son tour au pilori des surprescripteurs ? En toutes lettres, il nuance : les MG, bien qu’ils traitent à eux-seuls la plupart des troubles dépressifs, ne peuvent être tenus pour responsables de l’envolée de la consommation médicamenteuse. Le CSS enjoint la société tout entière à participer à prévenir les troubles dépressifs et la consommation excessive de médicaments, qui passe dit-il par de meilleures conditions de vie pour tous, par une éducation au bien-être et par une information vers le grand public sur les possibilités de prise en charge alternatives à la médication.
Un déroulé logique
Il est impossible de restituer ici l’avis touffu du CSS, auquel les Drs Eeckeleers et Orban, de la commission santé mentale de la SSMG, ont contribué en tant qu’experts externes. Mais il peut être consulté dans son intégralité sur le site du CSS.
En substance, le CSS insiste sur la nécessité de procéder à une évaluation complète de la situation du patient, en pointant les signes indiquant qu’on est devant un trouble dépressif majeur, et enjoint de prendre en compte les aspects comorbidités, facteurs de risque et de protection, et l’appartenance du patient à des groupes spécifiques (notamment les enfants et adolescents – « attention à la sous-estimation ! » – ou les personnes âgées). Une fois le diagnostic posé, il s’agira de mettre en place un projet thérapeutique sur le long terme, selon le modèle bio-psycho-social qui vise à restaurer le fonctionnement psychosocial et à prévenir les rechutes.
Ce modèle amène à considérer (en impliquant le patient pour augmenter sa compliance) les différentes modalités thérapeutiques adéquates eu égard aux processus en cause (dépression uni- ou bipolaire, liée aux caractéristiques de la personnalité ou à des facteurs existentiels etc.). Ces modalités incluent une approche non médicamenteuse, s’appuyant notamment sur la psychoéducation du patient et de sa famille, l’accompagnement cognitivo-comportemental, la psychothérapie… Quant au traitement médicamenteux, il sera envisagé en 1ère intention face à une dépression sévère, en combinaison avec l’intervention psychothérapeutique, ou face à une dépression modérée si le patient refuse les autres stratégies, ou qu’elles font long feu.
Le MG se voit conseiller de faire appel au SSM (Service de santé mentale), au psychiatre et, éventuellement, de recourir à une hospitalisation en cas, entre autres, de risque suicidaire ou de dépression résistante ou récurrente, en présence de comorbidités psychiatriques et si le soutien ambulatoire n’est plus suffisant dans des problématiques complexes.
Coup doubleLe CSS ne s’est pas penché sur la seule dépression. Animé par la même logique d’usage optimal du système de soins et des options de l’arsenal thérapeutique, il a publié en parallèle des recommandations sur la prise en charge de l’anxiété. Celle-ci touche une grande partie de la population, sous forme de trouble clinique spécifique ou associé à d’autres pathologies, et est souvent d’évolution chronique. Ici aussi, le CSS indique que les troubles anxieux peuvent, le plus souvent, être traités par une approche non médicamenteuse (psychothérapie cognitivo-comportementale, techniques de relaxation, etc.). L’avis est également disponible en ligne. |
Mise en ligne 28/02/2014