L’Inami souffle ses cinquante bougies. Le vénérable institut s’est offert pour l’occasion une enquête auprès de 2.200 habitants de 18 à 75 ans. But de l’exercice, effectué à l’automne 2013 : connaître l’avis et les attentes des Belges sur différents points de l’assurance soins de santé et indemnités. Un chapelet d’aspects ont été sondés : la perception des systèmes soins de santé et incapacité de travail, l’accessibilité des soins, la hausse de leur coût pour la collectivité et les économies potentielles à lancer, la réceptivité aux applications de l’e-médecine, etc.
Touche pas à mon AMI
L’Inami a relevé un attachement au principe de solidarité sous-tendant l’assurance soins de santé et indemnités. Seuls 7% des sondés sont favorables à la mise en place d’une couverture de base destinée uniquement aux plus démunis, le reste relevant d’assurances privées. Le principe de proportionnalité des cotisations au revenu s’attire du reste 63% des suffrages. A noter qu’en matière d’accessibilité, l’enquête établit que 20% des citoyens craignent de basculer dans la pauvreté à la suite d’une maladie et que, parmi les personnes présentant le plus de problèmes de santé, une sur cinq postpose (déjà) des soins.
On retiendra que se dessinent les contours d’une forme de responsabilisation – ou de pénalisation – des assurés adoptant des comportements, des styles de vie, à risque. Risque avéré pour la santé, et partant, coût pour la collectivité. Et l’Inami d’illustrer en pointant que quasi quatre Belges sur dix estiment qu’en cas d’accident lié à la consommation de drogues, la responsabilité individuelle de l’intéressé devrait être davantage engagée. L’exemple de la toxicomanie peut paraître extrême, mais il y a de 20 à 30% de répondants qui se disent prêts à accepter une différentiation (en modulant le remboursement, par exemple) sur la base de (mauvaises) habitudes bien plus communes : exposition au soleil, alimentation grasse, manque d’activité physique, relations sexuelles non protégées, tabagisme…
Le MG plébiscité
L’enquête s’est également arrêtée sur la satisfaction face au système de soins, qui s’est avérée élevée. « Ce n’est pas neuf », admet l’Inami. S’étant cette fois focalisé sur ce qui coince ou irrite, et sur la fréquence de ces expériences négatives, il a relevé quelques reproches qui s’adressent, finalement, plutôt à la sphère hospitalière et aux spécialistes : sentiment de s’être vu prescrire des examens superflus par le spécialiste, difficultés de compréhension de la facture hospitalière et doute sur son exactitude, déficit d’information et d’aide lors d’une hospitalisation, impression d’une addition salée chez un spécialiste, ou d’avoir dû attendre trop longtemps pour un rendez-vous.
En comparaison, le médecin de famille, qui incarne plus que jamais le thérapeute proche et disponible, fait mieux que tirer son épingle du jeu. Quasi 87% de répondants se déclarent satisfaits à très satisfaits de l’entente avec leur MG, 80% du respect que le médecin traitant leur manifeste, 80% du temps qu’il leur consacre… Les services de garde de médecine générale sont crédités d’une soixantaine de pourcents de suffrages positifs (les services d’urgence des hôpitaux n’atteignant que 50%). Les délais d’attente pour un contact avec le généraliste conviennent à plus de deux tiers de la population, ce qui n’est pas le cas pour la médecine spécialisée (seulement 27% de satisfaits). Les spécialistes font moins bien, également, en matière de temps accordé au patient (seulement 50% de satisfaits).
Enfin, l’enquête met à jour un soutien notable à l’e-médecine dans son aspect circulation de données. 99% (!) des sondés sont favorables au fait que leur médecin traitant (MG ou MS) puisse consulter toutes les informations médicales les concernant disponibles chez tous les médecins et dans tous les hôpitaux via un réseau. Marquant: quatre citoyens sur dix estiment qu’aucune autorisation explicite de leur part n’est nécessaire pour procéder à cet échange.
50% de sondés prêts à payer plus pour conserver l’accès au spécialisteSi juguler les dépenses en santé apparaît comme une nécessité, la façon d’y arriver divise. « Aucun consensus n’existe sur la manière de maîtriser les coûts. En outre, certaines mesures provoquent des réticences. 27% des personnes interrogées seulement sont favorables à une plus grande spécialisation des hôpitaux. Par contre, la proposition de rembourser uniquement le traitement le moins cher quand des alternatives équivalentes existent est largement soutenue », indique l’Inami. « La restriction de la liberté de choix est un sujet délicat. 50% des personnes interrogées disent être prêtes à payer davantage pour continuer à avoir directement accès au spécialiste. » Même si aucun véritable consensus n’émerge, l’enquête a révélé que parmi les pistes de rationalisation, c’est l’exclusion des personnes âgées des soins onéreux (dans le questionnaire, la barre était fixée à 50.000 euros) qui récolte le plus grand soutien : entre 30 et 40% des sondés sont favorables à ce que les plus de 85 ans ne bénéficient plus de telles interventions. |
Mise en ligne : 4/04/2014